FRANCHISE SAAS ET INFORMATIQUE : LES CLES D’UN CONTRAT DE FRANCHISE REUSSI

Le contrat de franchise est un accord commercial et juridique par lequel une entreprise (le franchiseur) concède à une autre entité indépendante (le franchisé) le droit d’exploiter sa marque, son savoir-faire et de bénéficier d’une assistance commerciale et/ou technique continue, en contrepartie d’une rémunération, souvent composée d’un droit d’entrée et de redevances périodiques.

Dans le secteur des nouvelles technologies, le contrat de franchise est plus qu’un cadre commercial. Il se double d’un contrat informatique. Le cadre contractuel doit donc combiner les obligations classiques de la franchise avec celles d’un contrat logiciel (SaaS ou on premise) intégrant les enjeux de maintenance et de conformité RGPD.

La franchise repose sur trois incontournables :
1. Savoir-faire : la mise à disposition d’un savoir-faire secret, substantiel et identifié. Le savoir-faire doit être « éprouvé » et le franchisé doit être informé de l’étendue du savoir-faire.
2. Signes distinctifs : l’octroi d’un droit d’usage des signes distinctifs, tels que la marque, le nom de domaine, le logo.
3. Assistance : une assistance technique ou commerciale continue accompagnant le franchisé tout au long du contrat.
4. + 1 lorsqu’elle concerne un logiciel : licence logiciels, bases de données, algorithmes : la mise à disposition des produits suppose un encadrement juridique clair qui précise les conditions d’utilisation et de licence.

À noter.

Il n’existe pas une définition légale unique du contrat de franchise ; il est régi par le droit commun des contrats, du commerce, de la distribution, de la concurrence, des marques, etc.

En France, la loi Doubin [1] impose au franchiseur de fournir un Document d’Information Précontractuelle (DIP) au moins 20 jours avant la signature du contrat, afin d’assurer une décision éclairée du franchisé.

Pourquoi choisir la franchise pour une entreprise tech ?

La franchise est un système gagnant-gagnant :

Pour le franchisé.

  • Il profite instantanément de la notoriété d’une marque établie, facilitant l’acquisition de clientèle.

  • Il bénéficie d’une formation, de méthodes éprouvées, d’un réseau d’entraide liés au réseau.

  • Il peut accéder à des fournisseurs référencés avec de meilleures conditions.

Pour le franchiseur.

  • Il déploie sa marque (commerciaux, territoire …) sans investir directement dans chaque société.

  • Il capte des revenus via redevances régulières, tout en s’appuyant sur l’investissement du franchisé.

Cependant, le contrat de franchise suppose une implication importante de chacune des parties, et donc de s’assurer de la solidité et de la sécurisation du projet de franchise.

En effet, d’une part, pour le franchisé, le coût initial peut être élevé (droit d’entrée, investissements) et sa liberté est limitée par le contrat de franchise.

D’autre part, pour le franchiseur, il est nécessaire de développer un système d’accompagnement solide, de garantir la cohérence du concept, et de veiller à l’équilibre contractuel.

Comment le franchiseur se rémunère-t-il ?

En fonction des aménagements prévus dans le contrat de franchise, la rémunération du franchiseur est constituée de :

  • Droit d’entrée fixe.

  • Redevances d’exploitation : le plus souvent indexées sur le chiffre d’affaires réalisé par le franchisé.

  • Redevances de publicité : pourcentage du chiffre d’affaires ne pouvant être utilisé que pour la communication et la publicité.

  • Des frais d’accès aux logiciels et une redevance de maintenance informatique peuvent également être envisagés.

La franchise peut donc être un bon moyen de déployer son activité tout en limitant les investissements initiaux, à condition de proposer un savoir-faire intéressant.

Les éléments essentiels du contrat de franchise.

La mise en place d’un contrat de franchise suppose la fourniture des éléments suivants :

  • Rédaction d’un document d’information précontractuel (DPI), obligatoire [2] - mis à disposition du franchisé 20 jours avant la signature du contrat et lors de tout renouvellement ou cession du contrat.

  • Un manuel opératoire qui permet de prouver le savoir-faire, de former et de défendre juridiquement le franchiseur en cas de litige (non obligatoire, mais recommandé en pratique).

  • Comptes d’exploitation prévisionnels (non obligatoires, mais recommandé en pratique).

  • Contrat de franchise.

Spécificités du contrat de franchise en informatique et SaaS.

Lorsque le franchiseur met à disposition du franchisé un logiciel métier (ERP, CRM, SaaS spécifique) et/ou qu’il propose à la vente un logiciel, il est impératif de prévoir, dans le contrat :

Encadrer les responsabilités.

  • La répartition de la responsabilité entre les parties en cas de panne ou de bug.

  • Les mises à jour, la réalisation des opérations de maintenance, les conditions du support client et des formations (pour le franchisé et ses clients).

  • Les conditions d’hébergement.

  • Pour une franchise SaaS, définir en amont qui supporte les coûts d’abonnement, de maintenance, de cybersécurité …

Attention : L’accompagnement technique du franchiseur doit laisser le franchisé suffisamment autonome dans ses choix commerciaux pour éviter une requalification en contrat de travail.

Penser à la conformité RGPD.

Les franchisés sont amenés à traiter des données clients (en qualité de sous-traitant ou de responsable de traitement) via le logiciel fourni par le franchiseur. Il est donc indispensable de préciser :

  • Les rôles des parties : le franchiseur est-il sous-traitant ou responsable de traitement, les parties sont-elles responsables conjoints ?

  • Le cas échéant, les mentions exigées par les articles 28 ou 26 du RGPD.

  • Les obligations de sécurité et de confidentialité (délai et modalités de notification d’une violation, certifications, réalisation des analyses d’impact…).

  • La gestion des demandes d’exercice de droits.

Le franchiseur, au titre de son assistance commerciale et/ou technique, pourrait mettre en place des outils de conformité utilisables par l’ensemble de son réseau tels que des actions de formation et de sensibilisation des collaborateurs de son réseau, des outils et des procédures standardisées (registre RGPD, modèles d’AIPD, logiciel de conformité RGPD, modèles de clauses…). La fourniture de ces éléments apporte une valeur à la franchise, mais sécurise également tout le réseau. En effet, les impacts réputationnels négatifs d’une sanction CNIL ou d’une violation de données ont des conséquences sur l’ensemble des franchisés.

Prévoir la propriété des données.

Le franchisé est généralement considéré comme propriétaire des données de ses clients, car il est le plus souvent celui qui « prend l’initiative et le risque des investissements correspondants » [3] à la constitution de la base de données : investissements matériel, financier ou humain.

Le contrat de franchise devrait ainsi encadrer la propriété des données des clients du franchisé. Il est également recommandé de traitement la question de l’accès aux données du franchisé et de leur usage par le franchiseur durant la relation contractuelle et à la fin du contrat.

Un franchiseur qui vous propose de vraies solutions de conformité RGPD doit être valorisé lorsque vous cherchez à adhérer à un réseau.

Gérer la fin du contrat.

Le contrat de franchise est un contrat intuitu personae, qui ne peut être cédé par l’une ou l’autre des parties qu’avec l’accord de l’autre.

L’accord du franchisé peut être recueilli ab initio dans le contrat et n’est pas requis en cas de simple changement de contrôle du franchiseur. Dans ce cas, l’agrément du franchiseur est nécessaire pour la cession du contrat par le franchisé.

Le contrat prend fin à l’issue de la durée convenue entre les parties ou en cas de résiliation par une des parties.

À la fin du contrat, et selon ce qui a été prévu, la restitution ou la suppression des données du franchisé doit être effective. En effet, le franchisé étant (sauf exception) le titulaire des droits de propriété sur les données qu’il produit dans le cadre de l’exécution du contrat de franchise, et en l’absence de cession des données au franchiseur, rien ne doit faire obstacle à la restitution au franchisé de ses données.

Des clauses doivent encadrer la fin des licences logicielles, la désactivation des accès et parfois la portabilité des données vers un autre système informatique.

Attention : il convient de respecter les formes en fonction du contrat et éventuellement un préavis (max 18 mois) pour éviter de qualifier la résiliation en rupture brutale des relations commerciales établies.

Focus : Indemnité de fin de contrat : contrairement au statut d’agent commercial, le statut de franchisé ne donne pas automatiquement droit à une indemnité de fin de contrat. Néanmoins, il est courant de prévoir une telle indemnité :

  • lorsque le volume d’affaires réalisé par le franchisé a contribué à augmenter sensiblement le volume d’affaires de l’autre partie.

  • lorsque la clientèle est récupérée par le franchiseur.

La franchise participative : le franchiseur a la possibilité de prendre une participation dans la société du franchisé afin de se réserver une minorité de blocage. Néanmoins, les conditions de la prise de participation ne doivent pas limiter la liberté contractuelle et la liberté de la concurrence (notamment en limitant la possibilité pour le franchisé de mettre fin au contrat de franchise).

Contrat de franchise, exemple de clauses.

Le contrat de franchise doit être adapté à chaque projet. Néanmoins, voici les clauses principales qu’il doit contenir :

Clauses générales.

  • Objet, identité des parties.

  • Durée (souvent entre 3 à 9 ans, parfois jusqu’à 15-18 ans selon investissements).

  • Description du concept, activités, marché, cibles, savoir-faire.

  • Obligations du franchiseur : fournir le savoir-faire, transmettre les signes distinctifs, proposer une assistance continue.

  • Obligations du franchisé : respecter le savoir-faire, informer et parfois ouvrir ses comptes au franchiseur, conserver la confidentialité des conditions de franchise et du savoir-faire.

  • Conditions financières : détail du droit d’entrée, montant et calcul des redevances, apports obligatoires.

  • Licence et SLA logiciel : conditions de mise à disposition et du support du logiciel concerné.

  • Gestion de la conformité RGPD : répartition des responsabilités, description des traitements, apports du franchiseur.

  • Résiliation, fin du contrat : motifs, délais, procédures (notification recommandée, clause pénale, conséquences comme la non-concurrence post-contractuelle, etc.)

  • Loi applicable et juridictions compétentes.

Clauses spécifiques au contrat de franchise.

  • Non-concurrence et/ou non-affiliation : pendant ou après le contrat, validité conditionnée à sa durée, périmètre, et proportionnalité.

  • Exclusivité territoriale, d’approvisionnement ou sectorielle (souvent encadrée).

  • Rachat de clientèle (contre une indemnité).

  • Préemption et/ou d’agrément.

  • Promesse unilatérale de cession (cession de la clientèle à la cessation du contrat qu’elle qu’en soit la cause) - Attention : dans ce cas, le contrat doit être enregistré.

À vérifier avant de signer un contrat de franchise.

1. Quelle est la durée standard du contrat de franchise ? Inclut-elle un renouvellement tacite, et sous quelles conditions ?
2. Le DIP est-il complet, conforme à la loi Doubin (20 jours minima) et exempt de toute information trompeuse ?
3. Quelles sont les conditions de mise à disposition du logiciel ? Suis-je propriétaire des données que je créé ?
4. Comment la conformité RGPD du réseau est-elle gérée ?
5. La clause de non-concurrence est-elle proportionnée et valide juridiquement ?
6. Avons-nous développé un manuel opératoire ou tout autre document opérationnel pour structurer le transfert de savoir-faire ?
7. Le contrat d’adhésion est-il suffisamment modulable ou présente-t-il un déséquilibre significatif ?
8. Les clauses d’exclusivité territoriale ou d’approvisionnement exclusif sont-elles limitées dans le temps et proportionnées ?

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